Raccordement Hydro-Québec - Secteur Diageo
Dans le contexte du projet de conversion à l’électricité de la distillerie Diageo, à Salaberry-de-Valleyfield, Hydro-Québec doit construire une nouvelle ligne de transport souterraine à 120 kilovolts ...
Le territoire de Saint-Timothée a déjà été recouvert par un épais glacier qui, en fondant, s'est transformé en une immense mer intérieure, la mer Champlain. Les Amérindiens sont ensuite arrivés. Jusque-là, c'est la préhistoire. L'histoire commence avec l'arrivée de nos ancêtres venus d'Europe pour s'établir en Amérique. Les Amérindiens étaient d'habiles navigateurs. Sur leurs canots d'écorce, ils étaient les maîtres du fleuve Saint-Laurent.
Avec le réchauffement du climat qui se poursuit, l'eau salée de la mer se retire graduellement. La terre affleure peu à peu et des plantes se mettent à pousser. Plusieurs milliers d'années plus tard, il ne reste qu'un long fleuve par lequel s'écoule l'eau douce des Grands Lacs. C'est la naissance du fleuve Saint-Laurent.
Il y a 7 000 ans, les premiers habitants de notre région arrivent peu à peu : les Amérindiens. Ils viennent de régions plus au sud et ils sont à la recherche de gibiers. Ces Amérindiens appartiennent au groupe des « Iroquoïens». Les Iroquoïens vivent de chasse, de pêche et de cueillette. Ils doivent se déplacer souvent pour trouver du gibier. Il y a un peu moins de 1 000 ans, les Iroquoïens deviennent de plus en plus nombreux et le gibier se fait plus rare. Un nouveau mode de vie apparaît : l'agriculture.
Grâce à l'agriculture, les Iroquoïens ont moins à se déplacer pour trouver de la nourriture. Ils commencent à vivre dans des villages généralement situés en retrait des lacs et des rivières. L'été, après les semences, ils établissent des camps de pêche temporaires le long du Fleuve.
Les Iroquoïens ont occupé les îles et peut-être même les berges de Saint-Timothée. Des fouilles sommaires dans certaines îles ont révélé la richesse archéologique. Si la préhistoire vous intéresse, nous vous suggérons fortement d'aller visiter le Parc archéologique de la Pointe-du-Buisson situé à Melocheville, la ville voisine à l'est de Saint-Timothée.
De sa source, les Grands Lacs, jusqu'à son embouchure, l'océan Atlantique, le célèbre et majestueux fleuve Saint-Laurent suit un parcours très varié. Entre le lac Saint-François (Salaberry-de-Valleyfield) et le lac Saint-Louis (Beauharnois), le fleuve était particulièrement accidenté. Sur une distance de 22 kilomètres, il avait une pente de plus de 25 mètres à franchir dans un étroit couloir. Lors de cette dangereuse descente, le Fleuve avait à contourner des îles, à sauter des récifs et autres pièges tendus par la nature. On rencontrait dans cette section du Fleuve trois principaux groupes de rapides: les rapides de Les Coteaux, des Cèdres et des Cascades. Saint-Timothée est situé sur la rive sud du fleuve, entre Salaberry-de-Valleyfield et Beauharnois, face aux rapides des Cèdres. De nos jours, il n'existe plus de rapides à Saint-Timothée. Le tronçon du fleuve Saint-Laurent qui passait à Saint-Timothée a été détourné dans un grand canal où peuvent passer de très gros cargos. À la sortie de ce canal, on a bâti une centrale hydroélectrique.
Le Canada, devenu une colonie française appelée Nouvelle-France, se développe le long du fleuve Saint-Laurent, surtout à partir du XVIIe siècle. Le fleuve Saint-Laurent est alors la principale voie de transport et de communication. La Nouvelle-France est divisée en seigneuries. Le développement des seigneuries est confié à des nobles que l'on appelle précisément les «seigneurs». Les seigneuries sont redivisées en concessions et ensuite en lots qui sont exploités par les colons qui paient des redevances aux seigneurs. On appelle ce système le régime seigneurial. Il cesse d'exister en 1854. Saint-Timothée est située dans la seigneurie de Beauharnois, concédée par le roi Louis XV au marquis de Beauharnois, en 1729. Saint-Timothée s'appelle alors «Pointe-aux-Érables».
Lorsque notre territoire appartenait encore aux rois de France, entre 1534 et 1760, l'endroit où est située Saint-Timothée n'était pas développé. C'est au début du XIXe siècle, après la conquête de la Nouvelle-France par la Grande-Bretagne, que le territoire a commencé à être défriché et à se peupler. C'est par le fleuve que sont arrivés les premiers habitants de Saint-Timothée.
Après la conquête de la Nouvelle-France par la Grande-Bretagne en 1760, la seigneurie de Beauharnois passe aux mains du marquis de Lotbinière. En 1795, la seigneurie est vendue à un riche commerçant anglais, Sir Alexander Ellice. Il divise sa seigneurie en plusieurs domaines auxquels il donne les noms des membres de sa famille. Saint-Timothée reçoit le prénom de sa fille Helen pour devenir «Helenstown». Les colons emploient plutôt le nom de leur église: Saint-Timothée. C'est grâce à Alexander Ellice et à ses héritiers que la seigneurie de Beauharnois connaît son véritable développement.
À compter de 1760, un grand nombre de colons d'origine britannique viennent habiter en Nouvelle-France. Des problèmes surgissent entre les nouveaux dirigeants anglais et les anciens colons français. Ceux que l'on appelle «les Patriotes» se révoltent en 1837 et en 1838. Le chef des Patriotes pour la région de Beauharnois est un jeune citoyen de Saint-Timothée, François-Xavier Prieur. Il sera arrêté et jugé. C'est par le Fleuve qu'il prend le chemin de l'exil vers la lointaine Australie.
Les eaux du fleuve Saint-Laurent, si tourmentées et si dangereuses pour les navigateurs, deviennent vite très importantes pour les premiers habitants de Saint-Timothée. La force de l'eau qui descend sert à faire fonctionner les moulins.
Le premier moulin est construit en 1831, pour le compte du seigneur Ellice. Il est situé à l'est du village, en bordure de la fameuse «Chute-aux-Bouleaux». Celui-ci possède plusieurs fonctions: moulin à farine, moulin à carder et à fouler la laine et plus tard, on y ajoute un moulin à scier le bois. Ce moulin cesse ses opérations vers 1910. Il est, par la suite, laissé à l'abandon et il est connu, dans ses dernières années, sous le nom de «pouvoir Langevin». On y retrouve aujourd'hui à cet endroit le barrage de Saint-Timothée.
Le deuxième moulin construit entre 1845 et 1850, sert de moulin à scie. Vers 1880, le moulin change de vocation; il devient une manufacture de laine. Il semble que ce moulin cessa de fonctionner au début du XXe siècle.
Au XIXe siècle, le commerce du bois devient très important. On transporte le bois en le faisant «descendre» par le fleuve Saint-Laurent et les rivières. C'est l'époque des grands radeaux de bois que l'on appelle «cages». On nomme «cageux» les hommes courageux qui dirigent les cages sur le fleuve. Les rapides du fleuve face à Saint-Timothée sont considérés comme les plus difficiles à traverser.
Une cage de bois est constituée de plusieurs radeaux attachés les uns aux autres. Chaque radeau mesure 12 mètres par 30 mètres. Il est en général construit de deux types de bois: le pin et le chêne.
Le pin est léger et il flotte. Il sert donc de base flottante aux radeaux. On empile le chêne par dessus car il est lourd et il ne flotte pas. Pourtant, il est très résistant à l'eau. C'est cette grande qualité qui en fait le meilleur matériau pour la construction des navires.
Dans les endroits où le fleuve est large et tranquille, les radeaux restent attachés ensemble pour former la cage. Les cageux vivent et dorment sur les cages. On compte de 20 à 30 hommes d'équipage par cage.
Quand les cageux arrivent à la tête des rapides, ils détachent les radeaux de la cage et les font descendre un à un. Ils les dirigent tant bien que mal avec des rames de 10 mètres de long installées à l'avant et à l'arrière du radeau. La descente des rapides constitue la partie la plus dangereuse du travail des cageux. Si le radeau se brise ou heurte un récif, c'est une mort certaine qui les attend.
Entre Saint-Timothée et Les Cèdres, deux dangereux rapides attendent les cageux: au nord, le rapide des Cèdres, et au sud, devant Saint-Timothée, la Chute-aux-Bouleaux. Les cageux doivent absolument manoeuvrer pour prendre le rapide des Cèdres. Aucun radeau ne peut résister à la Chute-aux-Bouleaux de Saint-Timothée. Beaucoup de cageux y sont morts. L'époque héroïque des cageux se termine au début du XXe siècle. On construit maintenant des bateaux en fer.
Les rapides entre le lac Saint-Louis et le lac Saint-François sont un obstacle important pour ceux qui voyagent sur le fleuve. Pour faciliter le passage de leurs embarcations, les nouveaux arrivants européens effectuent divers travaux. Ils aménagent des petits canaux qui seront toujours remplacés par des plus larges. Au bout du compte, on a presque complètement détourné le Fleuve de son tracé original. Les premiers travaux pour faciliter la navigation ont lieu sur la rive nord du Fleuve qui est plus facile d'accès. Les Français ont tout d'abord débroussaillé les berges et élargi les sentiers de portage des Amérindiens. Les Français aménagent aussi des rigolets. Ce sont des digues de pierre érigées le long des berges pour ralentir le courant et permettre aux bateaux de passer. Les rigolets sont les précurseurs des canaux. En 1760, lorsque la Grande-Bretagne achève de conquérir la Nouvelle-France, le général anglais Amherst perd 63 bateaux et 86 hommes en voulant descendre les rapides de Coteau, des Cèdres et des Cascades pour aller attaquer Montréal.
Après la conquête, les Anglais creusent une série de petits canaux pour remplacer les rigolets. Certains possèdent des écluses. Ils permettent d'éviter les rapides les plus dangereux. On peut admirer l'un de ces canaux au Parc historique de Coteau-du-Lac. C'est le premier canal à écluses au Canada.
La navigation augmentant de même que la grosseur des bateaux et la quantité de marchandises, de plus grands canaux sont aménagés. Le premier grand canal à être creusé est l'ancien canal de Beauharnois. Il passe sur la rive sud du fleuve, sur le territoire de Saint-Timothée. C'est un grand canal parce qu'il évite tous les rapides entre le lac Saint-François et le lac Saint-Louis. La construction de l'ancien canal de Beauharnois débute en 1842 et il est ouvert à la navigation en 1845. Entre Salaberry-de-Valleyfield et Melocheville, il possède une profondeur de 3 mètres. Tout au long de son parcours, il y a 9 écluses à traverser. La construction de l'ancien canal de Beauharnois provoque un scandale politique et financier. De plus, de tristes événements marquent l'année 1843. Les 2 000 ouvriers irlandais déclenchent un arrêt de travail qui semble être la première grève au Canada. Les ouvriers irlandais qui travaillent sur les chantiers du canal sont mal rémunérés, mal nourris et mal logés. Ils travaillent quinze heures par jour, de quatre heures le matin à sept heures le soir.Le 13 juin 1843, une émeute sanglante éclate à Saint-Timothée. 1 000 grévistes marchent dans le village. La cavalerie et la milice chargent les manifestants. Officiellement, on dénombre 5 tués et 50 blessés. Selon les témoignages, il y aurait eu au moins 20 morts. Tout au long de cette grève, qui dure 22 jours, les habitants de Saint-Timothée vivent dans la terreur.
Après 62 ans d'utilisation, l'ancien canal de Beauharnois est fermé à la navigation en 1907. À partir de 1911, il sert de canal d'amenée d'eau pour la centrale de Saint-Timothée. Il est malheureusement remblayé dans les années 1960, à l'exception d'une courte section que l'on peut encore admirer au centre-ville de Salaberry-de-Valleyfield. C'est le seul grand canal au Canada à avoir subi ce triste sort.
Source : Saint-Timothée revisité, célébré et raconté 1829-2004